Accessibilité numérique et ARCOM : retour sur l’ordonnance de renforcement des sanctions encourues
La conférence nationale du handicap (CNH) a eu lieu le 26 avril 2023 sous le patronage du Président de la République. L’un des objectifs fixés durant cette réunion est l’accessibilité numérique à 100%, un objectif ambitieux appuyé par une ordonnance du gouvernement, proposée le 6 septembre 2023, visant à accentuer les sanctions aux manquements des obligations d’accessibilité des services de communication au public en ligne, dont l’une d’elles pouvant aller jusqu’à 50 000 euros d’amende. Cette mesure a été validée le 22 novembre 2023 dans le cadre de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH). Une bonne nouvelle ?
Des initiatives bienvenues
Mettre les bouchées doubles en faveur de l’accessibilité, c’est la promesse que le gouvernement a présenté par le biais de deux ordonnances lors du conseil des ministres du 6 septembre 2023.
La première de ces ordonnances, présentée par Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et Aurore Bergé, ministre des solidarités et des familles, vise à améliorer l’accessibilité des personnes sourdes, malentendantes, sourdaveugles et aphasiques aux services téléphoniques. Elle institue des mesures pour assurer le respect des règles concernant l’accessibilité des services d’accueil téléphonique prévues aux articles 105 de la loi pour une République numérique et L. 112-8 du code de la consommation, en établissant des conséquences pénales en cas de non-respect.
La seconde ordonnance, présentée par le ministre de la transformation et de la fonction publique, Stanislas Guerini, vise à accroître les peines en cas de non-respect des devoirs concernant l’accessibilité des services de communication en ligne, tel que stipulé dans la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Une ordonnance que l’on pourrait comparer à un moyen d’accélérer le chantier exigé par l’accessibilité numérique, les démarches publiques en ligne étant aujourd’hui devenues la norme.
Trois nouvelles directives pour un même objectif
Bien que le gouvernement ait initié un plan de rattrapage massif afin d’assurer l’accessibilité des procédures et des sites internet du secteur public, le défi à présent est d’intensifier les actions entreprises et de surveiller rigoureusement le respect de la conformité de ces sites d’ici à 2024.
La nouvelle ordonnance apporte trois changements concernant l’accessibilité des plateformes en ligne des administrations publiques. Les voici tels qu’annoncés dans le compte rendu du Conseil des ministres du 6 septembre 2023 :
- En ce qui concerne l’accessibilité des sites, déjà rendue obligatoire depuis la loi de 2005, le non-respect de cette exigence est maintenant passible de sanctions, dont le montant maximal est fixé à 50 000 euros.
- L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) est désormais compétente pour identifier et constater les manquements, en s’appuyant notamment sur des méthodes de collecte automatisée, et émettre des injonctions préalables aux sanctions.
- Si un manquement sanctionné persiste plus de six mois après le prononcé de la sanction initiale, une nouvelle sanction peut être infligée (au lieu d’un an auparavant).
Qu’est-ce qui change pour l’accessibilité ?
L’accessibilité numérique est devenue une obligation légale depuis 18 ans pour le secteur public, cependant de nombreux sites internet peinent toujours à l’appliquer. En effet, jusqu’à sa récente révision, la loi de 2005 exigeait que tous les sites internet français répondent à cette obligation sans pour autant énoncer de condamnation claire dans le cas d’un manquement. En ce sens, le premier changement apporté par l’ordonnance démontre une volonté du gouvernement à encadrer la question de l’accessibilité des sites web. Pouvant entraîner des sanctions pénales, traduites par une amende forfaitaire allant jusqu’à 50 000 euros, le non-respect de la loi du 11 février 2005 se durcit considérablement dans le but de rendre les acteurs du monde numérique plus sérieux et impliqués vis-à-vis de l’accessibilité.
Ayant fusionné ses deux entités préexistantes, à savoir le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) et l’Hadopi (Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet), l’ARCOM veille depuis 2022 à garantir le respect des règles et des obligations dans le secteur de la communication audiovisuelle et numérique. Grâce à l’ordonnance de renforcement des sanctions, l’ARCOM devient référent sur le contrôle de la bonne mise en œuvre de l’accessibilité des sites internet. Ainsi, il lui appartient de relever les carences ou les fautes relatives à l’accessibilité numérique sur les sites web des administrations publiques.
Il est à noter que l’ARCOM priorise un angle diplomatique en soumettant des avertissements et rappels quant aux obligations de la loi sur l’accessibilité avant une éventuelle application de sanction. Le seuil de tolérance avant condamnation n’est cependant pas évoqué à date.
Le délai de correction d’un manquement aux normes d’accessibilité est lui raccourci de moitié comme l’indique la dernière modification apportée par l’ordonnance gouvernementale. En effet, si une faute sanctionnée perdure au-delà de six mois suivant la première sanction, une nouvelle mesure punitive peut être appliquée. Une initiative de plus pour accélérer l’application de l’accessibilité numérique et provoquer une prise de conscience plus forte pour les services de communication au public en ligne, et, à terme, chez tous les détenteurs de sites internet en France.
Malgré l’ajout de ces trois modifications, certaines obligations demeurent inchangées telles que les obligations complémentaires, incluant la publication d’une déclaration d’accessibilité, la création et la diffusion d’un schéma pluriannuel, sur trois ans, de mise en accessibilité décliné en plans d’actions annuels. Également, la publication du plan d’action pour l’année en cours ainsi que l’indication sur la page d’accueil de la conformité ou non du site et la possibilité pour les utilisateurs de signaler les manquements à l’accessibilité ne changent pas. Le non-respect de ces obligations complémentaires reste passible de sanctions, pouvant aller jusqu’à 25 000€ d’amende.
Une vraie avancée pour l’accessibilité numérique
Établie dans le cadre de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées, l’ordonnance représente une avancée significative, attendue de longue date, pour promouvoir l’inclusion numérique. Cette mesure législative a pour objectif de garantir l’accessibilité des contenus en ligne pour les personnes en situation de handicap. En vertu de cette décision, les sanctions contre les manquements à ces obligations seront donc renforcées à compter du 1er janvier 2024, témoignant ainsi de l’engagement du gouvernement à rendre les services numériques accessibles à tous.
Il n’est plus à démontrer que l’accessibilité numérique est cruciale pour permettre une participation équitable à la société. Permettre aux personnes en situation de handicap d’accéder à l’information des services numériques publics, et bénéficier de toutes les opportunités offertes par le monde en ligne sont en passe de devenir une normalité. L’ordonnance n° 2023-859 renforce les mécanismes de contrôle et de surveillance pour assurer la conformité aux normes d’accessibilité, incitant ainsi les entreprises et les organismes à prendre des mesures proactives pour rendre leurs plateformes en ligne accessibles. En instaurant des sanctions plus sévères pour les manquements à ces obligations, espérons que cette mesure stimulera la prise de conscience et l’action, encourageant une adoption généralisée des pratiques visant à rendre les services numériques plus inclusifs, et en ne s’arrêtant pas uniquement aux administrations publiques. C’est également une démonstration de la volonté des autorités de faire respecter les droits fondamentaux des personnes handicapées, en mettant l’accent sur l’égalité des chances et la participation active de toute la société numérique.
En somme, cette ordonnance, ratifiée par le gouvernement le 22 novembre 2023 dans le cadre de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, représente un pas important pour le territoire numérique des services publics. Une perspective optimiste pour l’avenir, qui projette déjà d’appliquer ces mesures à toutes les démarches essentielles d’ici au 31 décembre 2025.
Que vous soyez propriétaire d’un site internet d’administrations publiques ou non, n’attendez plus pour y appliquer les normes d’accessibilités numériques. Contactez-nous pour demander un devis ou pour obtenir plus d’informations sur nos prestations.